Transcription intégrale de l’émission spéciale du 11 mars 2024 animée par Fabrice COUSTE – RadioImmo
Avec Marie-Pierre LOISEL, directrice Galtier Expertise Environnement et Anne -Hélène CHEVREL, responsable des expertises immobilières Ouest Galtier Valuation.
Pollution des sols et évaluation des concessions automobiles
Dans un contexte de Zéro Artificialisation Nette des sols (ZAN), l’espace est de plus en plus contraint et le foncier se fait rare pour les agents économiques comme pour les pouvoirs publics. La solution passe par la construction de la ville sur la ville qui implique d’utiliser au maximum les surfaces déjà artificialisées. Certaines de ces friches industrielles nécessitent une dépollution souvent coûteuse avant remise sur le marché.
Comment évaluer ces zones polluées ? Quelles sont leurs spécificités ? Comment les traiter et à quel coût ? Qu’en est-il des concessions automobiles qui sont nombreuses à changer de main en ce moment ?
Il n’a jamais été autant question de pollution des sols depuis la loi Climat et résilience du 22 août 2021 qui a posé un objectif de zéro artificialisation nette (ZAN) à l’horizon de 2050. Le durcissement des règles relatives à l’artificialisation a fait bondir la demande d’évaluation des zones polluées. Dans ce contexte, on se trouve contraint d’utiliser du foncier jusqu’alors délaissé à cause des problématiques liées aux activités industrielles qui s’y exerçaient. En effet, le passé industriel d’un site doit être géré en fonction des régions et des pratiques.
Aujourd’hui on se retrouve confronté à des problématiques de compatibilité des sols avec un usage, la méthodologie du ministère de l’Environnement imposant de travailler dans ce sens. Ainsi, il faut rendre compatible un état des sols voire des eaux souterraines avec un usage donné.
Ces zones polluées sont notamment des friches, c’est-à-dire des terrains avec un passé industriel, laissées à l’abandon. Ces friches industrielles n’ont pas forcément fait l’objet d’une cessation d’activité en bonne et due forme par l’exploitant souvent pour des raisons économiques.
La désindustrialisation de la France a amené nombre de groupes industriels à la tête de grands patrimoines fonciers, à abandonner leurs sites. Les secteurs les plus concernés sont ceux de la chimie, la pétrochimie ou l’industrie lourde avec les aciéries, la métallurgie… dont les activités occupaient de grandes surfaces. Ces groupes industriels cherchent aujourd’hui à se dessaisir de ce patrimoine en cherchant des solutions voire des opportunités pour le réhabiliter et le recycler.
Qu’en est-il de l’évaluation des concessions automobiles dont le secteur connait actuellement des bouleversements ?
L’industrie automobile et notamment le secteur des concessions est en plein bouleversement pour des raisons économiques et technologiques mais également pour des raisons de place. En 2023, notre filiale Galtier Valuation a été sollicitée dans le cadre de l’évaluation de près de 320 concessions automobiles. Ceci est le reflet de plusieurs phénomènes que sont la concentration des groupes, leurs besoins de financement mais aussi de la mutation du secteur qui concerne également les groupes de production automobiles.
En effet, les groupes cherchent à baisser leurs coûts et à concentrer leurs distributeurs. Par exemple BMW souhaite baisser à 20 le nombre de distributeurs sur la France, Stellantis quant à lui souhaite baisser de 50% ses coûts de distribution. Les concessions automobiles sont souvent regroupées sur des zones en entrée de ville où l’on trouve plusieurs marques qui occupent de fait des surfaces importantes. L’objectif ZAN pousse ainsi les concessionnaires à chercher des friches, des anciennes usines ou concessions pour pouvoir s’installer. Les concentrations multimarques au sein de groupes sont désormais de mise afin d’évoluer vers une distribution multimarques qui permettra de baisser les coûts de distribution et de proposer une plus grande diversité de produits.
Par suite de l’augmentation inhabituelle des demandes d’évaluation de concessions en 2023, il nous a semblé opportun d’adresser un questionnaire aux groupes nationaux sur la façon dont ils voyaient la mutation du secteur. Il en ressort que sur la période 2022-2023, beaucoup de transactions ont été effectuées pour arriver fin 2023 à une situation où toutes les petites et moyennes surfaces ont déjà été concentrées. Ce phénomène devrait se poursuivre dans de moindres proportions, les opportunités ayant déjà été saisies.
Néanmoins, d’autres voies se dessinent dans le secteur avec notamment celui des casses automobiles puisque désormais, le réparateur d’un véhicule doit proposer un devis avec des pièces de seconde main. Les distributeurs et constructeurs ont la volonté de maîtriser ce marché et s’intéressent de près aux casses automobiles ce qui implique des évaluations de Galtier Valuation sur ce type d’activité. Contrairement aux idées reçues, il s’agit de grosses structures aux aménagements très coûteux, parfaitement sécurisées sur le plan environnemental car très surveillées par les Dreal qui veillent au respect des normes réglementaires environnementales et souvent évaluées plusieurs millions d’euros.
Les anciennes casses automobiles ou ferrailleurs n’existent plus compte tenu de la réglementation, le traitement est désormais assuré par des professionnels du déchet et notamment de la dépollution du véhicule. Ces installations répondent à une réglementation concernant les rejets et tout doit être traité ou à tout le moins maîtrisé afin d’éviter toute pollution des sols. Auparavant, les véhicules étaient dans certains cas démontés à même le sol avec le risque que les fluides s’infiltrent dedans.
D’autres phénomènes liés au manque de place poussent à déménager des activités dans les zones commerciales d’entrée de ville comme les carrosseries qui étaient autrefois intégrées à la concession. Les concessions neuves ne disposent plus que d’un atelier minute, la carrosserie est désormais délocalisée en fond de zone où le foncier est beaucoup moins coûteux.
Galtier Valuation intervient pour évaluer les bâtiments qui abriteront ces carrosseries. L’évolution du monde des concessions automobiles est à l’origine de nombreuses transactions sur la France entière pour lesquelles les experts en évaluation immobilière de Galtier Valuation interviennent sur l’ensemble du territoire grâce à une implantation nationale qui nous permet d’avoir une parfaite connaissance du marché local.
Comment se passe la valorisation de ces terrains en fonction des coûts de dépollution et de l’emplacement souvent privilégié en entrée de ville ?
La valorisation du terrain va dépendre de l’usage qui en sera fait. Les exigences de dépollution seront différentes en fonction de l’activité qui sera exercée sur le site. L’implantation d’une crèche impliquera évidemment un niveau de dépollution et une méthodologie différente que pour une concession automobile. L’avantage de faire appel à un groupe comme Expertises Galtier pour réaliser ces évaluations consiste à être assisté par des équipes pluridisciplinaires à même de donner une valeur vénale de l’actif sans réserve. En effet, nos rapports apportent un éclairage sur les coûts de remise en état techniques, réglementaires et de dépollution qui peut être utile dans le cadre d’une négociation avec un vendeur ou d’un financement. Il est aujourd’hui impossible de faire l’économie d’une investigation des sols et notamment d’un diagnostic de pollution des sols. La phase 1 permet de retracer l’historique du site et des activités qui auraient pu être polluantes, la phase 2 de réaliser des investigations plus poussées qui peuvent aller jusqu’au carottage. Ces travaux permettent d’évaluer les coûts de dépollution. Par exemple, l’entretien des véhicules pose des problématiques liées aux hydrocarbures, le rôle des ingénieurs de GEE consiste à trouver la bonne technique de dépollution à un coût économiquement acceptable et qui pourra garantir la compatibilité d’usage dans le futur.
La dépollution est-elle coûteuse, comment la calcule-t-on ?
Cela dépend. Il y a eu une évolution de la réglementation afin d’éviter le transfert de pollution. Auparavant, dans le cas d’une pollution, l’excavation des sols permettait de stocker la terre dans un centre de déchets. Aujourd’hui, les spots de pollution, c’est-à-dire les zones les plus concentrées, sont traitées, le reste est mis sous avec une marge de tolérance sur les teneurs. S’il n’existe pas de risque de transfert de la pollution, il est préférable de la laisser sur site sous surveillance plutôt que de la transférer et de polluer ailleurs.
Le traitement des sols contaminés se fait notamment par biopile in situ qui utilise les bactéries, par venting ou encore par bioremédiation qui est un procédé de dépollution biologique « environnementalement propre et correct » … Il existe beaucoup de solutions pour traiter les sols, la difficulté est le temps dont on dispose puisque bien souvent les délais sont contraints.
Existe-t-il des certifications ou des labels environnementaux sur cette activité ?
Les prestations de services relatives aux sites et sols pollués doivent répondre aux exigences de la norme NF X31-620. Galtier Expertise Environnement possède cette certification qui lui permet d’intervenir en cessation d’activité comme l’impose la réglementation.
Cette certification édictée par le ministère de l’Environnement a pour vocation d’imposer des bonnes pratiques aux prestataires en sols pollués, la profession n’étant pas réglementée.
Ce marché est-il inflationniste ?
La pollution des sols est un sujet récent. Il y a 15 ans, on s’intéressait beaucoup moins à ces problématiques qui sont devenues prégnantes avec l’évolution de la réglementation. Aujourd’hui dans le cadre de cessions, on ne peut se dispenser d’un diagnostic de pollution des sols indispensable pour sécuriser la transaction.
Pour autant l’identification d’une problématique n’est pas toujours dramatique, elle est souvent un levier de négociation.